Robot-journalisme : menace ou opportunité ?
Un nouveau rapport montre les limites et les avantages du journalisme automatisé, selon les rédacteurs et les journalistes qui ont déjà utilisé cette technologie
Londres, Mars 2017 : Les journalistes et les rédacteurs en chef sont d'avis que les « robots-journalistes » n'ont pas beaucoup de flair pour aller chercher l'information et qu'ils produisent des articles unidimensionnels, selon un nouveau rapport publié aujourd'hui dans la revue scientifique internationale Digital Journalism.
Des chercheurs, dirigés par le Professeur Neil Thurman de LMU de Munich et de la City, University of London,
ont interviewé des journalistes, des rédacteurs en chef et des
dirigeants de CNN, de la BBC, de Thomson Reuters, de Trinity Mirror et
de News UK. Tous ont eu une expérience pratique avec le logiciel d'écriture robotisée de l'un des principaux fournisseurs de cette technologie.
Manque de contexte et de créativité
Les journalistes et les rédacteurs en chef ayant participé à l'étude du Professeur Thurman pensent que la dépendance du journalisme automatisé aux flux de données et la nécessité de programmer à l'avance des angles journalistiques signifient que les articles produits manquent de contexte, de complexité et de créativité par rapport au journalisme traditionnel. Témoignant de son expérience d'utilisation d'un logiciel d'écriture, un journaliste de la BBC déclarait qu'il n'aurait « jamais, au grand jamais, rédigé un tel article ». Un autre, journaliste sportif chevronné de CNN, a qualifié le texte produit de « irréfléchi et répétitif » et a conclu que la plus grande partie de ce qu'il doit inclure dans un article « ne peut pas être programmée ».
Difficile à mettre en place dans les rédactions
Les journalistes interrogés pensent aussi que la nécessité de planifier à l'avance les articles écrits de manière automatisée est un inconvénient. L'un d'eux, travaillant à la BBC, a déclaré : « Vous
ne pouvez pas obtenir de réaction à propos des chiffres rapportés, vous
ne pouvez rien leur expliquer ou leur demander, parce que la trame de
l'article a été écrite avant que les données chiffrées ne sortent », et a conclu, après avoir personnellement utilisé la technologie d'écriture robotisée, qu'il était inutile pour la BBC de poursuivre ses recherches sur cette technologie.
Plus de vitesse pour moins de dépenses ?
Malgré
ces lacunes, les journalistes sont d'avis que le robot-journalisme peut
potentiellement réduire les coûts et augmenter la vitesse et la
spécificité d'un certain type de journalisme. Les journalistes de CNN et
de Reuters ont pensé que cela pouvait « réduire les coûts » en remplaçant « les salariés touchant un salaire élevé » qui effectuent un « travail assez simpliste et prenant ». Un journaliste de Reuters a pensé que l'automatisation pouvait améliorer la vitesse et la précision, et a déclaré « Nous l'envisageons dans tous les services de l'entreprise ». Un autre journaliste de Reuters a dit que l'automatisation serait utilisée pour les articles pour lesquels ils « n'ont pas les ressources nécessaires pour les couvrir manuellement ».
Et l'objectivité journalistique dans tout ça ?
Le
robot-journalisme était perçu comme quelque chose qui pouvait à la fois
soutenir et menacer l'objectivité journalistique. Un journaliste de The Sun a affirmé que cela pourrait permettre de « présenter les faits bruts », sans la « manipulation » du journalisme humain, ce qui, à ses dires, pourrait être « un assez bon outil pour la démocratie ». Au contraire,
un autre journaliste, travaillant à la BBC, s'est inquiété du fait que
l'important volume de contenu qu'il est possible de produire avec
l'automatisation pourrait faciliter l'influence d'individus ou
d'organisations sur la ligne éditoriale.
Une technologie à utiliser ou pas ?
En dépit de ses limites, le
rapport révèle des projets pour que la technologie soit déployée plus
largement, ce qui pourrait potentiellement remplacer des « centaines » de journalistes au sein de la seule agence de presse Thomson Reuters.
Selon le Professeur Neil Thurman, « Le
robot-journalisme est limité dans sa capacité à fournir le contexte
contemporain qui est essentiel à de nombreux reportages, dans sa
capacité à comprendre les nuances de l'expression humaine qui aident à
déterminer la manière dont les évènements sont rapportés, et dans sa
capacité à reconnaître systématiquement le point de vue journalistique
le plus important. Nous pensons
cependant que cette technologie sera de plus en plus souvent utilisée
pour produire des rapports factuels simples, pour augmenter la vitesse
de publication de tels rapports, et pour couvrir des sujets actuellement
en deçà du seuil de reportabilité.»
« Malgré tout, ajoute le Professeur Neil Thurman,
l'augmentation du volume d'informations résultant de l'automatisation
pourrait rendre plus difficile la navigation dans un monde déjà saturé
par l'information et accroître en réalité le besoin de compétences
humaines que les bons journalistes incarnent (jugement de l'information,
curiosité et scepticisme) afin de continuer à être informés de manière
succincte, complète et exacte sur le monde qui nous entoure ».
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Pour plus d'informations
- Le rapport, When reporters get hands-on with robo-writing : Professionals consider automated journalism's capabilities and consequences, a été publié dans Digital Journalism. Les auteurs sont les professeur Neil Thurman (LMU Munich et City, University of London), Konstantin Dörr (University of Zurich) et Dr Jessica Kunert (LMU University of Munich).
- Le rapport complet est disponible gratuitement ici : http://neilthurman.com/hands-
on-with-robo-writing.pdf . La publication est disponible également sur le site de Digital Journalism : http://www.doi.org .
Contact Presse :
Mihaela Fiordean, Agence Noir sur Blanc
Tel. 01 41 43 72 75 / E-mail : mfiordean@noirsurblanc.com
À propos de la City, University of London
La City, University
of London est une université internationale idéalement située en plein
cœur de Londres qui s'engage à l'excellence académique et est axée sur
le commerce et les professions. Elle fait partie des cinq pour cent des
meilleures universités dans le monde selon le Times Higher Education World University Rankings 2013/14 et figure dans le top trente des universités du Royaume-Uni selon le Times Higher
Education Table of Tables 2012. Elle est classée dans le top 10 des
meilleures universités du Royaume-Uni en ce qui concerne les emplois
obtenus par les diplômés universitaires (The Good University Guide 2014) et dans le top 5 en matière de salaires des diplômés en début de carrière (Lloyds Bank).
L'université
attire plus de 17 000 étudiants (35 % au niveau du 3e cycle
universitaire) venant de plus de 150 pays et un personnel universitaire
originaire de plus de 50 pays. Elle propose un large choix de matières
et ses domaines de spécialité, à savoir le commerce, le droit, les
sciences de la santé, l'ingénierie, les sciences mathématiques,
l'informatique, les sciences sociales et les arts, notamment le
journalisme et la musique, sont reconnus au niveau mondial. L'histoire
de l'université débute en 1894, avec la fondation du Northampton
Institute, où se trouve désormais la majeure partie du campus de la
City. En 1966, une charte royale octroie à la City le statut
d'université et le Lord-maire de Londres est invité à en devenir le
chancelier, une disposition unique toujours en vigueur aujourd'hui. Le
Professeur Paul Curran est président de la City, University of London depuis 2010. https://www.city.ac.uk/
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